Dans un bon nombre de rites maçonniques, le thème de la mort apparaît dès le 1er grade. Au RER, une image de la mort est donné à l’impétrant dès son séjour dans la Chambre de Préparation.
Ainsi, on peut lire dans l’Instruction Morale du grade d’Apprenti du Rite Ecossais Rectifié :
« L’image de la mort vous y a été offerte pour vous apprendre que, pour bien vivre, l’homme doit souvent penser à l’instant où il quittera cette vie.»
Penser la mort pour bien vivre
Cela ressemble fort au conseil du philosophe grec : « Penser la mort pour vivre bien ». Il s’agit là d’un véritable appel à cultiver l’art de bien vivre. L’auteur maçonnique Oswald Wirth écrivait : « Laisser derrière soi une mémoire honorée doit être l’ambition de chacun … Nous devons vivre de manière à laisser derrière nous un dynamisme de bien, héritage précieux… Sachons bien vivre, et la mort ne sera pour nous que le moyen de vivre mieux encore. » Ainsi, nous pouvons dire que cultiver l’art du bien vivre est une forme d’apprentissage du bien mourir.
La philosophie maçonnique laisse entendre que « bien vivre », ce n’est pas remplir sa vie de futilités ni de rechercher les biens matériels ou les plaisirs mais d’exercer la bienfaisance, de contribuer à l’amélioration de l’humanité, de respecter et d’aimer son prochain…
La mort n’est pas le dernier mot
Le Maître sait que ses actes lui survivront et que ce qu’il a créé de positif subsistera parce que la Franc-Maçonnerie est une société de mémoire. Dans la loge, il est d’ailleurs fait régulièrement mémoire des frères et des sœurs décédés, notamment lors de la Chaîne d’Union.
Nos cœurs ne doivent pas être le tombeau de nos frères et, d’une certaine manière, les maçons disparus survivent au travers de leurs frères. La formule maçonnique du « passage à l’Orient éternel » peut être considérée comme une métaphore qui exprime un au-delà de l’existence individuelle, le passage de la chair à l’esprit, du concret au spirituel, de la finitude au commencement de l’être.
« Penser à la mort », comme nous y invite le rituel du Rectifié, c’est penser qu’après nous, d’autres pourront prolonger notre œuvre. C’est un peu la logique du forestier : il plante des arbres dont il ne verra pas la taille adulte. Il plante pour les générations à venir et non pour lui-même dans une logique égocentrique confinée dans des limites temporelles.
Ainsi, la mort n’est pas le dernier mot de tout, elle n’est pas une défaite. Bien au contraire, la mort est la condition d’une résurrection dans la mémoire des hommes. Celui qui laisse une œuvre a le sentiment qu’il ne meurt pas en entier puisque rien ne se perd dans l’univers.