Au Rectifié, le jour de sa réception, le nouveau Frère fait la promesse d’exercer la bienfaisance, « … d’être bienfaisant envers tous les hommes… ».

La pratique de la bienfaisance se veut l’affirmation de la fraternité et de la solidarité qui caractérisent l’idéal maçonnique et le Régime Ecossais Rectifié ne déroge pas à cet engagement.

Jean-Baptiste Willermoz, principal architecte du Régime Ecossais Rectifié, appela d’ailleurs « La Bienfaisance » une Loge dont il fut le fondateur à Lyon au 18ème siècle. Les historiens soulignent l’engagement et le dévouement de ce même Willermoz dans la vie civique et sociale, se consacrant notamment à l’Hôtel-Dieu puis aux hospices civils de Lyon dont il fut l’administrateur bénévole pendant de nombreuses années. A l’image de la bourgeoisie lyonnaise, J-B. Willermoz est réputé prendre une part active à la réalisation d’œuvres de bienfaisance, en s’occupant d’enseignement primaire et en venant en aide aux indigents.

La bienfaisance, une des bases essentielles de l’Ordre

Le Rite Ecossais Rectifié fait de la bienfaisance une marque distinctive du franc-maçon :

« D. Comment un Franc-Maçon doit-il se distinguer des autres hommes ?
R. Par une bienfaisance active et éclairée, par une façon de penser noble et élevée,
par des mœurs douces et par une conduite irréprochable. »
(Questions –réponses du grade d’apprenti au RER)

Les textes du Rectifié présentent la bienfaisance comme une des « bases essentielles » et un des buts principaux de l’Ordre. D’ailleurs, l’Ordre dont nous parlons ici s’appelle « Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte ». Un Ordre « complètement voué à faire le bien », écrit le comte François-Henri de Virieu dans son mémoire sur la bienfaisance, lu le 29 juillet 1782, lors du Convent de Wilhemlsbad. Le mémoire de de Virieu fût adopté par l’Assemblée et la substance de son texte fut reprise dans l’article V, entièrement consacré à la « Bienfaisance », de la Règle maçonnique en 9 points spécifique du RER.

Une bienfaisance douce et consolante

Au Rectifié, le Frère Préparateur, le jour de la réception au grade d’Apprenti, présente la Franc- Maçonnerie au candidat comme « un Ordre ancien et respectable, voué principalement à une bienfaisance active et universelle, laquelle doit s’étendre à tout ce qui peut être utile aux hommes, soit aux individus, soit à la société en général. » (rituel du grade d’apprenti du RER)

Cette manière de qualifier la bienfaisance est reprise par le VM qui, s’adressant au candidat, avant qu’il n’amorce les trois voyages pénibles et mystérieux qui lui procureront la lumière, l’interpelle de cette façon : « … Etes-vous (aussi) décidé à pratiquer, selon votre pouvoir, envers tous les hommes, qui sont aussi vos Frères, les actes d’une bienfaisance douce, consolante et universelle ? »

Les textes des rituels apprennent donc que le Maçon doit non seulement « s’engager à exercer la bienfaisance envers tous les hommes » mais qu’il doit également « la professer » !

Au 18ème Siècle, on appelait le Tronc des Aumônes, la « Bourse des infortunés ». Le rituel du 1er grade du RER nous indique qu’il s’agit « d’exercer la bienfaisance envers tous les hommes, et principalement envers les indigents. » Les indigents, c’est-à-dire les pauvres, les miséreux, les nécessiteux ou, pour parler comme les textes de la Règle en 9 points : « tout être qui souffre ou (qui) gémit ».

Cette même Règle maçonnique en 9 points, spécifique au RER, accorde une mention particulière « à l’enfance dans la misère » … « qui réclame ton appui » et « à la jeunesse » inexpérimentée et « menacée par les erreurs et les séductions » … « qui sollicite tes conseils ».

L’exercice de la bienfaisance est un impératif

Le rituel du grade d’Apprenti précise que « le Maçon dont le cœur ne s’ouvre pas aux besoins et aux malheurs des hommes, est un monstre dans la société des Frères. » Ainsi, pour le Régime Ecossais Rectifié, la bienfaisance est un impératif, une obligation pour tous les Frères. Secourir les personnes dans le malheur n’est pas une alternative mais bien une exigence, un devoir sacré même : « tout être qui souffre ou gémit a des droits sacrés sur toi », lit-on dans la Règle.

Le Maçon « doit se garder de méconnaître » les besoins de l’humanité et d’attendre pour agir qu’ils se manifestent à lui. Il se doit de prévenir les nécessités de l’individu dans le dénuement, d’aller au-devant des êtres dans la détresse. D’après la Règle, il ne doit « point attendre que le cri perçant de la misère le sollicite ».

De plus, le Maçon ne doit jamais être convaincu « d’avoir assez fait » dans ces domaines. Son exercice de la bienfaisance doit être animé par une action inlassable et une énergie sans cesse renouvelée. « La vertu qu’on nomme bienfaisance est cette disposition de l’âme qui fait opérer sans relâche en faveur des autres le bien… », mentionne de Virieu.

Mais, alors que tous les textes de référence du Rectifié prônent une bienfaisance générale dans le sens le plus étendu du terme, à la fois active et réfléchie, Willermoz et de Virieu vont nous prévenir dans le même temps des dangers et des limites de telles actions…….

A SUIVRE…

A propos de l'auteur Voir tous les posts

JCS

Avec une pratique de plus de vingt années du Rite Écossais Rectifié, J.C. Sitbon a été Vénérable Maître de sa loge de 2003 à 2006 et rédacteur en chef, jusqu’en 2008, de L’Etroit Lien, journal destiné à une dizaine de loges provençales travaillant au Rite Écossais Rectifié.

En 2009, il fonde et depuis anime le Cercle d’Etudes et de Recherches sur le Rite Écossais Rectifié  (CERRER), situé à Marseille, dont les travaux visent à approfondir l’histoire des origines, de la structuration et de l’évolution de ce rite maçonnique. LE CERRER accorde également une place importante à l’étude de la symbolique et aux spécificités du Rectifié, tout en privilégiant une approche universelle.