Les francs-maçons se disent « enfants de la veuve », à l’image d’Hiram dont « … sa mère était une veuve de la tribu de Nephtali… », lit-on dans les rituels.

Cette parenté d’Hiram est conforme aux Écritures (Premier Livre des Rois 7, 13-14). A la formulation « enfants de la veuve », le Rite Écossais Rectifié fournit la justification suivante : « … parce qu’après la mort de notre Respectable Maître Hiram, les Maçons prirent soin de sa mère, qui était veuve, et se regardèrent comme ses enfants, le Maître Hiram les ayant regardés comme ses Frères. »

Nous trouvons parfois d’autres explications à l’expression « fils de la veuve ». Certains considèrent, en effet, qu’après le meurtre d’Hiram, c’est la Franc-Maçonnerie elle-même, qui est devenue, par la mort de son Grand Maître, « une Veuve et ses enfants ».

La veuve dans les textes bibliques

Dans l’Antiquité juive, la veuve est socialement marginalisée car elle est signe de malheur par excellence. Elle n’a plus aucune richesse, rien qui lui appartienne en propre. Au contraire, elle devient propriété de sa belle-famille, tandis que sa propre famille n’a aucune obligation de l’aider. Bien souvent, pour assurer sa subsistance et celle de ses enfants, elle n’a comme seule issue que d’accepter le remariage avec un frère de son mari. C’était la loi du Lévirat.

Dans tous les récits bibliques, la veuve est également le modèle de la pauvreté sans défense. Mais Dieu se préoccupe d’améliorer peu à peu son sort. Comme l’orphelin et l’étranger, la veuve fait l’objet d’une protection divine : « C’est Dieu qui rend justice à la veuve et à l’orphelin et Il aime l’étranger. » (Deutéronome 10, 18) L’Éternel est le Père de l’orphelin et le défenseur des veuves : « … vous ne maltraiterez aucune veuve ni aucun orphelin. Si tu le maltraites et qu’il crie vers moi, j’écouterai son cri.» (Exode 22, 21-22)

Les Évangiles couvrent également la veuve d’un grand respect, comme chez Luc : « Comme Jésus enseignait dans le temple, levant les yeux, il vit les gens riches qui mettaient leurs offrandes dans le tronc du trésor. Il vit aussi une veuve misérable y déposer deux piécettes. Alors il déclara : en vérité, je vous le dis : cette pauvre veuve a mis plus que tout le monde. Car tous ceux-là ont pris sur leur superflu pour faire leur offrande, mais elle, elle a pris sur son indigence : elle a donné tout ce qu’elle avait pour vivre. » (Luc 21, 1-4)

La veuve a ainsi tout « misé », sans retenue, sur le don de son bien vital et Luc avertit ceux « … qui dévorent les biens des veuves et affectent de prier longuement, ils subiront la plus rigoureuse condamnation. » (Luc 20, 46-47)

La protection de la veuve et de l’orphelin

Les veuves évoquées dans les textes bibliques représentent le plus souvent les pauvres, les humbles, les opprimés qui mettent en Dieu tout leur espoir, qui demandent et prient. C’est certainement dans cet esprit que le sac (ou la boîte) destiné à recueillir l’obole des Frères et des Sœurs à la fin de chaque tenue maçonnique, pour les œuvres de solidarité et d’entraide, est appelé en Maçonnerie « Tronc de la Veuve ».

Notons enfin que la protection de la veuve et de l’orphelin constitue une ardente obligation du serment chevaleresque qui fait écho à ce verset de l’Epître de Jacques : « La religion pure et sans tâche, devant Dieu notre Père, consiste à visiter les orphelins et les veuves dans leurs afflictions…» (Epître de Jacques 1, 27)

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JCS

Avec une pratique de plus de vingt années du Rite Écossais Rectifié, J.C. Sitbon a été Vénérable Maître de sa loge de 2003 à 2006 et rédacteur en chef, jusqu’en 2008, de L’Etroit Lien, journal destiné à une dizaine de loges provençales travaillant au Rite Écossais Rectifié.

En 2009, il fonde et depuis anime le Cercle d’Etudes et de Recherches sur le Rite Écossais Rectifié  (CERRER), situé à Marseille, dont les travaux visent à approfondir l’histoire des origines, de la structuration et de l’évolution de ce rite maçonnique. LE CERRER accorde également une place importante à l’étude de la symbolique et aux spécificités du Rectifié, tout en privilégiant une approche universelle.